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Journal d'une future ancienne dépressive

24 novembre 2012

01. Sous les pavés : la mare

 Aller chez le psy, c'est se résoudre à remuer la merde.

Avant, tout n'allait pas bien. Certes. Mais je vivotais, tant bien que mal. Je tenais debout, j'avais une vie sociale, un peu de motivation, et je mangeais à peu près correctement.

Maintenant je ne dors plus très bien, je fais des crises de stress (les crises d'angoisse ne sont plus très loin), et mon ventre demande de nouveau à être rempli plus que de raison. J'ai du mal à trouver la force de sortir de chez moi ou à prendre soin de mon nid pourtant si douillet.

Je suis en souffrance.

 

Ce n'est pas que mon psy est nul, bien au contraire. Avant, je vivotais parce que j'avais tout enfoui bien profond, m'interdisant de penser, m'accrochant à toutes ces choses à faire. Le déménagement est terminé. Le train train du travail est bien installé. La danse, les apéros, tout est réglé comme du papier à musique. Chaque chose ou presque a trouvé sa place.

Je me retrouve donc seule, face à moi-même. Aucune autre alternative que de penser à moi. Penser aux choix qui m'ont amenée ici, ce soir, dans cette ville et dans cette vie.

Pour l'instant, je ne confie au psy que des choses que j'ai l'habitude de raconter à d'autres. Il n'y a donc pas beaucoup de surprise. Quand il me conseille, je lui réponds que je sais. Car oui, je sais. Je sais déjà que je devrais avoir plus d'estime de moi, je sais que demander à n'importe qui de me rassurer ne fonctionne pas, je sais que ma mère m'aime et que ce n'est pas de ma faute si elle est alcoolique. Je sais.

Alors pourquoi ces séances me mettent-elles dans un état pareil ? Puisque je ne raconte rien d'inédit, ma carapace devrait tenir. Mais je sens qu'elle se fissure. Moi qui ne fais jamais de cauchemars, je commence à faire des rêves étranges. Tous les mardis, la veille de mes séances donc, je me sens mal, les mains me grattent de nouveau, et je remplis ce ventre que je déteste.

J'ai construit un mur. Les émotions le traversent très difficilement. Seuls y passent la rage, la déception, et le soulagement. Ce mur est très pratique, il m'évite de m'effondrer. Parfois je me sens forte, je me sens prête à l'abattre, et puis je réalise que l'abattre ce serait me laisser envahir par tout un tas de choses pour lesquelles je ne suis pas prête.

Le psy lui ne me laisse pas le choix. Il tire sur les briques de ce mur, ou sur les pavés de ce sol si solide que j'ai bati. Je commence à apercevoir ce qui se cache sous ces pavés, érigés là depuis ma plus tendre enfance : une immonde mare marronnâte, opaque et sale. Toutes ces émotions refoulées, tous ces souvenirs enfouis, ont créé une espèce de magma infâme. On ne discerne plus rien, tout est fondu, mélangé, coagulé.

Il va falloir maintenant travailler à déliter la boue de cette mare. Parce que peut-être qu'au fond se trouve des clés, et qu'elles me seront indispensables pour comprendre, évoluer, avancer.

 

Je veux être moi, mais en mieux. Et pour ça, je vais devoir enlever plus de pavés, et me jeter dans la mare.

 

 

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24 novembre 2012

00. La décision

Avant, tout n'allait pas bien. Certes. Mais je vivotais, tant bien que mal. Je tenais debout, j'avais une vie sociale, un peu de motivation, et je mangeais à peu près correctement. J'avais un chéri adorable et prévenant.

Un soir de juillet, je suis rentrée à la maison précipitamment, et je l'ai quitté. Adieu nos six ans de vie commune, adieu nos projets, adieu la facilité du quotidien, adieu la stabilité financière. Ce n'était pourtant que le début des grands bouleversements.

Un déménagement ; un mémoire à terminer ; un tas de paperasses à remplir ; un CDI (le premier !) à signer : une vie à reconstruire. J'en ai bavé, mais j'étais tellement fière de me débrouiller enfin toute seule !

Car oui. Je ne savais plus m'occupée de moi-même. J'avais tout délégué à T., l'homme aimé et aimant. Je lui avais délégué le ménage, la lessive, les repas. Mais également mes états d'âme, les coups de fil de ma mère, mon stress. C'est lui qui gérait. Comment moi, une fille si forte d'apparence, avait pu me laisser aller à ce point ? Je ne savais plus (ne pouvais plus ?) m'occuper de moi, j'en étais devenue incapable. Et je me sentais glisser, lentement mais très sûrement, vers les conneries. Celles que l'on fait pour se sentir vivant. Car je me sentais morte, je n'étais plus un individu mais une coquille que T. remplissait comme il pouvait. Et moi je le repoussais de toutes mes forces, je commençais à le détester de me donner autant d'amour, de me retenir si fortement dans ce monde qui ne m'intéressait plus vraiment.

Une rupture donc. Un déménagement, un CDI : une nouvelle vie. J'ai repris la danse classique, rêve depuis longtemps mis de côté. Je me suis inscrite à la danse africaine pour pouvoir me défouler. J'ai squatté le canapé et la bouteille de vin des collègues compatissants. J'ai serré les dents.

 

Et je suis allée voir un psy.

 

 

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